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mardi 22 août 2006

Auvergne-Rhône-Alpes

Minatec : le pôle de compétitivité grenoblois

CGT STmicroelectronics Grenoble. Juin 2006.

Nous mettons notre position en débat : Minatec est positif mais la vigilance s’impose.

Une industrie stratégique

En 2005, l’ensemble des syndicats italiens et francais de ST faisait une déclaration, appuyés par une pétition signée à des milliers d’exemplaires par les salariés, qui disait notamment : « Nous considérons que l’industrie du semi-conducteur reste une industrie stratégique à la fois parce qu’elle est toujours innovatrice et qu’elle est à la base de toutes les industries modernes.

Nous demandons aux états français et italiens actionnaires de ST de rester présents dans le capital au niveau actuel. Nous demandons aux gouvernements des pays européens et aux autorités européennes de mettre en œuvre une politique active pour soutenir et re-dynamiser cette industrie de haute technologie.

Nous leur demandons d’exercer leur devoir de contrôle sur l’usage des fonds publics versés à STMicroelectronics. »

La coopération entre entreprises, laboratoires publics et enseignement public, est souhaitable. Les volontés politiques dans les collectivités, au niveau national et européen, la mise en place des moyens financiers et techniques, la création des enseignements sont les forces motrices d’un développement. La création d’emplois est une conséquence possible à tous les niveaux de qualification.

Nos syndicats mènent un combat de longue date et parfois difficile contre les stratégies de repli ou de délocalisation. L’abandon du dernier plan social, la reprise des embauches à ST, le démarrage de Minatec sont donc encourageants.

Inauguration et protestation. Débat et démocratie.

En ce début juin, MINATEC a été inauguré, et en même temps une manifestation de protestation a eu lieu. Sans faire état des positions ici des organisations qui y ont appelé, nous donnons ici notre avis, parce que notre ambition est de contribuer au débat parmi les salariés sur un certain nombre de problèmes globaux que posent Minatec, Minalogic et la politique industrielle de ST. Sur ces sujets, nous ne pouvons pas laisser la Direction ou les actionnaires de ST agir et penser pour nous, nous devons nous forger nos opinions.

Comme tout progrès technologique important, les nanotechnologies et MINATEC vont avoir des retombées très importantes en matière industrielle et commerciale, mais aussi de santé, d’environnement, etc... Il aurait été normal qu’un tel investissement soit précédé et accompagné d’un vaste débat au sein de la population et des salariés concernés.

Santé

La petitesse des structures obtenues grâce aux nanotechnologies permet d’envisager des applications médicales inédites avec par exemple le ciblage des cellules tumorales par des nanobilles. Mais cette petitesse laisse craindre des effets négatifs sur la santé, style « amiante ». Nous sommes à la recherche d’informations sur les risques y compris professionnels que pourraient entraîner de nouveaux procédés industriels, notamment la dissémination de telles particules dans le corps humain. Pour que les Comités Hygiène, Sécurité et Conditions de travail jouent efficacement leur rôle, il faudrait augmenter leurs moyens et leurs pouvoirs.

Politique sécuritaire

Ne devons-nous pas nous opposer aux développements visant des buts militaires ou de surveillance des populations ? Les fameuses puces RFID (sous forme de micro étiquettes interrogeables par ondes hertziennes) qui pourraient fournir des informations sur tous les actes individuels, ne sont-elles pas à éviter ou restreindre ?

Besoins sociaux

Certaines des productions correspondent assez mal aux besoins prioritaires de la population mondiale. Le consumérisme et le productivisme sont des valeurs pour les actionnaires, mais pas pour les consommateurs et les salariés. Cette remarque vaut pour ST, et pour les productions à venir via MINALOGIC et MINATEC.

Nous entendons à l’extérieur de ST des préoccupations qui nous interrogent : captage excessif des fonds publics au profit des recherches autour de Minatec, Minalogic, dérive de la Recherche et de l’Enseignement etc.

Ecologie

ST se targue d’écologie. Mais est-on sûr d’économiser les ressources énergétiques de la planète en répartissant le flux de production dans ses différentes étapes à travers des centres éloignés de milliers de km ? En participant à la gestion des flux tendus qui contribuent à diminuer les stocks et augmenter le nombre de transports tant dans l’achat des fournitures que dans la vente des produits ?
La fabrication et la diffusion de nano-produits entraînent des risques potentiels à une échelle inconnue jusqu’à présent. Voit-on le moindre questionnement critique de la part de ST ?

Aménagement du territoire

La forte polarisation de l’agglomération grenobloise autour de certaines techniques n’est pas le garant d’un développement général de l’emploi. Il peut sembler naturel de se focaliser sur certains secteurs industriels pour avoir un effet de taille, optimiser les investissements, etc... Mais il faut aussi se rendre compte que ce mode de développement introduit également une grande faiblesse qui peut faire de gros dégâts en cas de changements économiques importants (cf. les régions sinistrées par les mutations de la sidérurgie ou du textile). Il semble contradictoire de miser beaucoup sur la microélectronique dans l’agglomération alors que les acteurs de ce secteur, ST en tête, donnent une priorité stratégique aux investissements et aux embauches en Asie. Les affaiblissements d’autres industries de l’agglomération résultent peut-être de la focalisation locale sur notre industrie mais aussi d’autres facteurs de la mondialisation. Vaste débat !

La démocratie

La démocratie semble largement oubliée.

L’information du personnel ST et de ses élus, notamment de Crolles et de Grenoble est insuffisante. Jusqu’à très récemment, on trouvait plus d’informations sur Internet que dans les exposés des dirigeants de ST dans les instances représentatives du personnel. Les relations avec les instances politiques n’ont pas permis, à ce jour, d’obtenir des documentations spécifiques consistantes. Au-delà de l’information, les élus du personnel n’ont aucun pouvoir d’expertise ou d’investigation et encore moins de veto.

ST est une entreprise où la participation publique dans le capital est d’environ 17% et où les subventions publiques sont décisives. ST va être fortement impliquée dans les deux structures. Nous pensons que ST et ces structures devraient être dirigées par les collectivités publiques dans un ensemble cohérent qui permettrait un contrôle démocratique conséquent. Nous ciblons ici le débat sur ST, mais la question du contrôle public et de ses modalités plus démocratiques qu’aujourd’hui est planétaire.

Dialogue et mobilisation

Nous avons l’intention de nous ouvrir au dialogue notamment avec les forces syndicales présentes dans les secteurs de l’Industrie, de la Recherche et de l’Enseignement. Nous pensons que l’information ne viendra qu’appuyée par des exigences et des mobilisations. Nous souhaitons aussi que l’équivalent de la CRIIRAD pour le nucléaire, existe pour les nanotechnologies : Un organe d’expertise technique indépendant des pouvoirs publics et des entreprises. Les syndicats des entreprises et des secteurs publics, les organisations de consommateurs ont aussi leur mot à dire. Ne laissons pas nos cerveaux au vestiaire, débattons !