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La nouvelle mission du CNU : derrière l’évaluation, la masse salariale
Le CNU est l’instance administrative qui, dans le cas spécifique des enseignants-chercheurs, se prononce “sur les mesures individuelles relatives à la qualification, au recrutement et à la carrière” (Décret n°92-70 du 16 janvier 1992 modifié, art.1). Jusqu’à ce jour, les élections du CNU pouvaient peut-être nous sembler, à nous les enseignants-chercheurs, relever d’un enjeu principalement
scientifique : il s’agissait de constituer une commission composée de collègues que nous estimions prêts à prendre le temps de lire et d’analyser les dossiers scientifiques des docteurs et des titulaires
de l’HDR (Habilitation à diriger les recherches) susceptibles de se présenter à un concours de recrutement, ainsi que ceux des collègues sollicitant une promotion ou un congé pour recherche.
Depuis la dernière élection du CNU, cependant, le paysage universitaire a été à ce point transformé par les réformes gouvernementales que le sens et l’action de cette instance en sont profondément transformés. En particulier, le CNU est en charge d’une nouvelle mission : il “procède à l’évaluation de l’ensemble des activités et de leur évolution éventuelle des enseignants-chercheurs” (sic),
évaluation devant désormais être “prise en compte pour les mesures relatives à la carrière des professeurs des universités et maîtres de conférences et à l’attribution de certaines primes et indemnités” (art 1). Nos élus seront dès lors sommés de procéder à l’évaluation de l’ensemble des collègues en poste, sur la base de l’obligation faite aux enseignants-chercheurs par le nouvel article 7-1 du décret de 1984 (modifié en avril 2009) de produire “au moins tous les quatre ans, et à chaque fois qu’il est candidat à une promotion, un rapport mentionnant l’ensemble de ses activités et leurs évolutions éventuelles”. Lors du mouvement historique de 2009, parmi les rares concessions arrachées, la communauté universitaire a en effet obtenu que cette nouvelle procédure d’évaluation soit au moins soumise à l’avis scientifique compétent des pairs et réalisée par une instance nationale élue. Ainsi évitait-on au moins que les présidents d’Université ne décident seuls, c’est-à-dire sans aptitude reconnue à juger du contenu scientifique, d’un classement sur lequel pourrait s’appuyer la modulation individuelle du service des enseignants-chercheurs. Le projet de fiche d’avis de l’actuelle commission permanente du CNU adopté en mars 2011 manifeste la volonté de faire
aboutir cette évaluation à un classement A / B / C de tous les enseignants-chercheurs : nos pairs seraient ainsi appelés, au sein des sections CNU, à accomplir eux-mêmes le travail de hiérarchisation de l’ensemble de la communauté des enseignants-chercheurs, offrant ainsi aux présidents des Universités autonomes une base - d’autant plus légitime qu’elle émanera de la profession elle-même - pour déterminer à qui des modulations de service pourront être proposées.
Ce qui, dans les établissements, permettra d’“inviter” celles et ceux qui auront été classés défavorablement à accepter une révision à la hausse de leur service d’enseignement pour optimiser la masse salariale et, à terme, la comprimer. La préoccupation alléguée de l’évaluation scientifique révèle son véritable motif : la hiérarchisation des personnels en vue de la compression de coûts.