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Le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche (ESR) élabore depuis plusieurs mois des projets pour « reconnaître la mission d’enseignement » de certains personnels de l’ESR. Lors de la phase de concertations, la CGT FERC Sup avait émis de très fortes réserves sur les premiers projets.
Lors d’une ultime réunion, le ministère a présenté deux textes qui précisent les orientations qu’il compte suivre (voir détails et analyse CGT ci-dessous). Elles concerneraient dans un premier temps les enseignants-chercheurs (EC) et dans un second temps les enseignants et les personnels BIATS.
La CGT FERC Sup note positivement la volonté de mettre en place un « Congés pour Projet Pédagogique » (CPP) sur le modèle des Congés pour Recherche et Conversion Thématique (CRCT), l’annonce d’une augmentation des CRCT, bien que très insuffisante, et de décharges pour retour de congé maternité. Cependant la CGT FERC Sup dénonce la volonté de contourner le CNU pour l’affectation des CPP. Le contingentement des congés qui se dessine (moitié CRCT, moitié CPP) semble problématique, car il pourrait ne pas correspondre aux besoins des EC. Elle continue à revendiquer du temps pour tous les EC, une diminution du service d’enseignement et l’augmentation du nombre de CRCT pour permettre à chaque EC d’obtenir un CRCT d’un semestre tous les 3 ans.
Le ministère veut mettre en place une prime « au mérite » élargissant la PEDR et nommée « PEEDR », censée reconnaître « l’engagement pédagogique » avec un mécanisme d’affectation purement local. La CGT FERC Sup s’oppose à cette prime, servie à une minorité d’EC, alors que les primes statutaires pour tous les EC restent à un niveau indigne de leurs qualifications. La question de « critères » pour l’affectation de telles primes reste posée : la CGT note que les premières propositions du ministère à ce sujet n’ont pas été présentées lors de la réunion (aux dires du ministère, pour éviter des polémiques), mais elles ne sont pas retirées pour autant. La CGT s’oppose à toute évaluation individuelle des enseignements qui résulterait de la mise en place d’une telle prime et revendique une revalorisation importante du point d’indice et une augmentation significative de la prime statutaire (PRES) pour tous les EC.
Pour conclure, la CGT FERC Sup dénonce la volonté du ministère de cibler des moyens (temps et primes) sur une minorité de collègues. La CGT FERC Sup est attachée à la reconnaissance des qualifications mises en jeu par les EC (enseignement et recherche), comme de tous les personnels et pour cela à la revalorisation du point d’indice, des grilles et des primes statutaires, contre le principe des primes « au mérite » ou à la fonction (PEEDR ou RIFSEEP).
La CGT FERC Sup s’oppose à tout ce qui pourrait scinder en deux le statut d’EC (séparant des EC « enseignants » et des EC « chercheurs »), à tout ce qui déconnecterait l’enseignement et la recherche. Elle dénonce toute velléité de secondariser l’enseignement supérieur : pour la CGT FERC Sup, chaque formation du supérieur doit rester adossée à la recherche.
Enfin, ces annonces tendent à écarter le CNU et à augmenter l’autonomie des établissements, ce qui correspond aux volontés de la CPU et du ministère de laisser chaque établissement gérer ses personnels en toute autonomie. Ceci est inacceptable. De plus, le cadre est celui de l’attaque frontale contre la Fonction publique et les statuts des personnels (CAP vidées de leur substance, CHSCT liquidés, recours accru à la précarité, facilitation des mobilités forcées, plan de départ de fonctionnaires…), que nous dénonçons avec force et qui nous rendent très méfiants sur les annonces de modifications des statuts des personnels.
Elle serait mise en place, ce qui modifierait la PEDR en « Prime d’Enseignement, d’Encadrement Doctoral et de Recherche » (PEEDR) pour les EC. Un dispositif basé sur le RIFSEEP serait mis en place par la suite pour les BIATS. Un dispositif particulier serait envisagé également pour les enseignants, sans qu’aucune précision ne soit fournie.
Il y a potentiellement 35.000 EC et 17.000 chercheurs, soit 52.000 personnels concernés par la PEDR. Passer de 3.000 bénéficiaires de la PEDR à 6.000 (chiffres annoncés par le ministère) pourrait sembler positif. Mais 11 % de bénéficiaires potentiels maximum, cela reste un ciblage d’une « élite ». Par principe, de telles primes « au mérite » détruisent les collectifs de travail et nuisent aux collaborations pour la recherche et l’enseignement. Le fait que la prime « Enseignement » (« partie E ») de la PEEDR puisse être cumulée avec la prime « Recherche » de cette même PEEDR laisse la porte ouverte à l’accroissement de toutes les dérives clientélistes.
Il n’est pas encore clair si le CNU participerait à l’attribution ou non de la partie E de la PEEDR et il y a une ambiguïté sur le maintien ou non de la gestion de quotas de dossiers par le CNU. Pour la CGT FERC Sup, le ministère veut à nouveau amoindrir le rôle du CNU et renforcer le localisme : tout en dénonçant le principe-même de la PEEDR, nous y serions opposés.
Enfin, la question de l’attribution de prime pour la reconnaissance de « l’engagement pédagogique », qu’elle soit purement locale comme le veulent la CPU et le ministère, ou en partie faite par le CNU, ouvre une boîte de Pandore : qui va évaluer un tel « engagement » pédagogique ? Des EC de la discipline ? D’une autre discipline ? Des évaluateurs « professionnels » « extérieurs » « indépendants » ? Des personnels qui ne sont pas EC ? Comment ? Les enseignements seront-ils inspectés ? Tiendra-t-on compte des retours des étudiants pour de telles primes ? Y aura-t-il une notation par les usagers ? Ce serait une véritable remise en cause des libertés académiques des EC, et serait pour la CGT FERC Sup tout à fait inacceptable.
En outre, attachée aux diplômes nationaux et à la reconnaissance des qualifications, la CGT FERC Sup s’oppose à la loi ORE et ParcourSup, à la casse du cadre national des Licences (fin des 1.500 heures de cours minimum pour une licence) et à la mise en place des licences à plusieurs vitesses. Par conséquent, elle s’oppose en particulier à ce que la gestion pédagogique des « oui si » soit un critère de sélection.
Enfin, la CGT FERC Sup rappelle que le point d’indice est quasi-gelé depuis 2000, et qu’il a perdu environ 15 % de sa valeur par rapport au coût de la vie. Rappelons aussi que les primes statutaires des EC sont parmi les plus basses de la Fonction publique : environ 100 € brut par mois ! Ces primes statutaires restent au moins 5 fois plus faibles que celles des IGR, corps similaire en terme de grille, au sein du même ministère. Les carrières de tous les personnels sont insuffisamment attractives, et la politique indemnitaire des EC est totalement dérisoire. Rajouter une prime pour certains personnels uniquement, qui pourront la cumuler avec d’autres primes, ne renforcera en rien l’attractivité des carrières et va contribuer à augmenter les tensions entre collègues, au détriment de la nécessaire collaboration pour les travaux de recherche et d’enseignement.
C’est pourquoi la CGT FERC Sup reste opposés au principe des primes « au mérite », telles la PEDR et le RIFSEEP, s’oppose à la création de la PEEDR, et exige la revalorisation du point d’indice, des grilles et des primes statutaires. Concernant, les primes statutaires, elles doivent atteindre, sans modulation et pour tous les personnels, 20 % du montant indiciaire moyen du grade. En attendant l’augmentation du point d’indice et l’intégration des primes dans le salaire, la CGT FERC Sup revendique que les budgets de PEDR soient transférés au budget des primes statutaires.
Ce CPP serait mis en place, sur le modèle des CRCT pour les EC. Pour en bénéficier, il faudrait déposer un projet. Les projets qui seraient susceptibles d’être acceptés pour un tel dispositif ont été largement changés par rapport à la proposition initiale : « découverte d’un autre environnement pédagogique, élaboration d’un plan de transformation des pratiques pédagogiques, suivi de formations, et éventuellement publications ». Il reste à voir ce que contiendront les « critères » au final. La CGT FERC Sup sera vigilante afin que le CPP ne soit pas utilisé pour faire élaborer des dispositifs pédagogiques du type « tout distanciel », qui conduisent à supprimer des enseignements présentiels et/ou à fermer des postes statutaires d’enseignement, d’ingénierie pédagogique ou multimédia.
Nous notons positivement la volonté d’augmenter le volume des CRCT (qui passeraient de 910 à 1000 semestres par an, soit 1,15 semestre supplémentaire par université…), la création d’un volume de 850 semestres pour les CPP. Mais cela reste complètement insuffisant.
Nous notons de façon particulièrement positive la volonté de créer une enveloppe spécifique de 150 semestres pour le retour de congé maternité, parental et d’adoption, qui seraient accordées sur simple dépôt d’un projet de recherche ou d’enseignement. C’est très important pour aider à améliorer les carrières des femmes notamment. Cette dernière mesure pourrait être mise en place dès 2019/2020. Un total de 2.000 semestres de congés serait donc mis sur la table à terme.
Toutefois, il nous semble contestable que le congé pour retour de congé maternité soit assorti d’un dépôt de dossier : celui-ci devrait être constitué et déposé pendant le congé maternité ! Ce qui dénote d’une conception étonnante du congé… Pour la CGT FERC Sup, la décharge d’enseignement dans ce cadre doit être accordée sur simple demande, comme c’est le cas dans certaines universités.
Nous notons positivement le fait de mettre en place une plateforme nationale pour le dépôt des demandes.
Nous notons que la mise en œuvre se ferait en 2 étapes, une première qui utiliserait le décret FP n° 2007-1470 sur la formation professionnelle et dans un deuxième temps une modification des décrets statutaires des personnels concernés.
La CGT FERC Sup réclame une baisse de la charge d’enseignement à 150 hTD pour tous les enseignants-chercheurs et 300 hTD tous les enseignants. L’augmentation de 10 % des CRCT, la création d’un volant de CPP et la mise en place d’une disposition spécifique pour le retour de congé maternité est donc positive, mais reste très insuffisante. Voici les remarques concernant le projet :
1) Rappelons qu’entre 2010/2011 et 2016/2017, le volume des CRCT a baissé de 1089 semestres CRCT par an à 900. Le retour à 1.000 semestres n’est donc qu’un rétablissement à une situation antérieure, mais qui était totalement insuffisante, rapportés au 35.000 enseignants-chercheurs et assimilés. En effet, en moyenne un EC ne peut bénéficier que d’un semestre de CRCT tous les 35 ans…
2) les 2.000 semestres (CRCT et CPP) annoncés permettraient d’accorder en moyenne 2,3 semestres par carrière d’EC (comptée sur 40 ans, ce qui est peu réaliste au vu du recrutement tardif). On reste donc très loin de l’objectif affiché d’un semestre tous les 3 ans par EC. Il faudrait passer à près de 12.000 semestres pour y arriver. Ce petit progrès reste donc largement insuffisant.
3) le volume prévu pour ces CPP (au même niveau que les CRCT) semble disproportionné : plus de temps pour la recherche bénéficierait sans doute plus aux EC.
4) 150 semestres de décharge d’enseignement pour les retours de congés maternité : d’après les chiffres du ministère, 4 % de femmes enseignantes ont un congé maternité par an (cf. bilan social 2016) : il y aurait environ 700 EC concernées par an. Ce petit progrès semble donc largement insuffisant, il faudrait avoir autant de semestres que d’EC concernées, pour pouvoir permettre à toutes les enseignantes-chercheuses d’en bénéficier.
5) Enfin, la CGT FERC Sup demande très fermement que le CNU ne soit pas écarté, comme c’est prévu, de l’affectation d’un volant de CPP. Nous restons fermement attaché à cette instance nationale, qui ne doit pas être contournée.
Montreuil, 20 mai 2019.