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samedi 25 mars 2017

Contrôle de carrière : outil de gestion RH

Depuis 2009, les enseignant·e·s-chercheur·e·s s’opposent à l’instauration d’une évaluation managériale de leur activité. Même si elle s’est travestie en « suivi de carrière » en 2014, ils s’opposent toujours à la mise en œuvre de cette obligation administrative qui s’ajoute à l’évaluation permanente dont ils font l’objet tout au long de leur carrière (qualification pour le recrutement, habilitation à diriger des recherches pour la progression de carrière, évaluation pour les promotions et congés pour recherche, comités de lecture pour les publications régulières qui jalonnent leur travail de recherche, etc.).

En juin 2016, suite au renouvellement des sections disciplinaires du Conseil national des universités (CNU), la Commission permanente du CNU (CP-CNU) avait fini par céder au chantage du gouvernement qui menaçait de transférer cette évaluation à une autre instance en votant la mise en place du « suivi de carrière » pour toutes et tous dès l’année 2017.

Néanmoins sous la pression des enseignant·e·s-chercheur·e·s et de leurs organisations syndicales, notamment la CGT FERC Sup, la CP-CNU était contrainte d’annoncer le 15 mars que seulement 24 sections sur 55 mettront en place la procédure de « suivi de carrière » en 2017.

Fortes de cette annonce, les organisations (CGT FERC Sup - SNESUP FSU - SNPREES-FO - SupAutonome-FO - SUD Éducation - QSF) ont dénoncé l’inégalité de traitement qui en découlerait et demandé solennellement au ministère de ne pas ouvrir, le 25 mars comme prévu, l’application ALYA destinée à la mise en œuvre du « contrôle de carrières ». Elles appellent les personnels à se joindre à leur demande en signant la pétition http://ne-pas-ouvrir-alya.ouvaton.org.

Dans le même temps le SGEN-CFDT, soutient la procédure de « suivi de carrière » et appelle les personnels concernés à préparer et présenter leurs dossiers d’évaluation.

Dès le 16 mars 2017, la Conférence des présidents d’université (CPU) publiait un communiqué qui « déplore fortement que certaines sections CNU ne respectent pas les engagements pris lors de l’assemblée générale de la CP-CNU de juin 2016 ». Comme les organisations de personnels, la CPU fait le constat que cette situation « crée une inégalité […] entre enseignants-chercheurs ».
Le ministère ne doit pas ignorer cette convergence d’analyse et doit repousser l’ouverture de l’application ALYA cette année pour que les conditions et objectifs de cette évaluation soient explicités, précisés, discutés et soumis à l’avis des instances représentatives des personnels concernées.

Dans ce même communiqué, la CPU donne des indications très précises sur la manière dont les présidents d’université entendent utiliser le soi-disant « suivi de carrière ».

La CPU y indique que « les établissements ont besoin de disposer d’éléments pour porter un avis, par exemple sur une demande de promotion ». Elle ajoute par ailleurs que « dans ces conditions, toute utilisation du suivi de carrière dans le cadre de l’accompagnement professionnel des enseignants-chercheurs n’aurait que peu de pertinence en termes de politique des ressources humaines ».

Ainsi, le « suivi de carrière » ne serait plus l’outil de soutien des enseignant·e·s-chercheur·e·s dans la conduite (ou la réorientation) de leur carrière comme se plaisent à le présenter le ministère et certaines organisations syndicales qui défendent encore le principe d’une évaluation volontaire demandée par certains enseignant·e·s-chercheur·e·s. Il aurait bien pour objectif, comme la CGT FERC Sup le dénonce depuis le début, le contrôle de l’activité et de la carrière des enseignant·e·s-chercheur·e·s à des fins de gestion des ressources humaines.

En effet, ce « contrôle de carrière » débouche nécessairement sur la modulation du service d’enseignement des enseignant·e·s-chercheur·e·s et tout particulièrement des maîtresses et maîtres de conférences. Sans exclure que cela puisse également servir à une rupture de contrat.

Cette prise de position de la CPU doit être rapprochée de ses différentes déclarations et propositions faites lors de son congrès annuel de Reims (Pensons l’université pour l’avenir, 28 février et 1er mars 2017) et à l’occasion de son interpellation des candidats aux élections présidentielles.

Dans son discours de clôture du colloque 2017, le président de la CPU, développe un argumentaire détaillé destiné à justifier l’exigence d’une plus grande autonomie des établissements d’enseignement supérieur et de recherche. La CPU réclame notamment de ne plus être soumise à ce qu’elle qualifie être « l’inadaptation d’un modèle unique à des établissements dont la diversité est une richesse » pour réclamer « un assouplissement des cadres réglementaires ». Ce plaidoyer pour une autonomie renforcée, supposée doter les établissements de marges de manœuvre leur permettant par exemple de « répondre de façon adaptée à la diversité des publics » en les libérant d’un « encadrement trop prescriptif des cursus » débouche, en terme de gestion de la main d’œuvre enseignante, sur l’exigence de la CPU de « rompre avec le carcan du calcul des services sur la base des sacro-saintes 192 heures équivalent TD ».

En revendiquant ainsi la possibilité d’« acquérir la possibilité de mener au mieux les recrutements » et d’obtenir des « marges de manœuvre […] sur les promotions », la CPU montre bien quel est son projet en matière de gestion des ressources humaines et de gestion de la masse salariale. Le contrôle de carrière des enseignant·e·s-chercheur·e·s s’insère donc dans cette perspective autonomiste et on comprend bien l’usage qui sera fait de cette évaluation professionnelle.

Comme pour l’Entretien professionnel individuel (EPI) des personnels BIATSS dont on nous avait assuré qu’il ne se transformerait jamais en système d’évaluation (ce qui débouche aujourd’hui notamment sur les promotions et l’évolution des rémunérations), le « suivi de carrière » que l’on nous présente comme un soutien à la carrière des enseignant·e·s-chercheur·e·s (de celles et ceux qui seraient notamment en difficulté dans leur activité d’enseignement ou de recherche), constitue bien un contrôle de carrière de toutes et tous les enseignant·e·s-chercheur·e·s dont l’objectif désormais clairement affiché sera la gestion de la masse salariale et des ressources humaines.

Désireuse de s’affranchir complètement du cadre réglementaire national, dans le chapitre « Vers une plus grande autonomie des universités » de son « Adresse à un futur Président de la République » en date du 21 février 2017, la CPU remet en cause la nécessité de la qualification pour recruter les enseignant·e·s-chercheur·e·s. En réclamant « au gouvernement de rendre effective la mise en place du suivi de carrière, par exemple par la désignation d’une autre instance chargée de le réaliser » dans son communiqué du 16 mars 2017, la CPU va encore plus loin et remet en cause l’existence même du Conseil national des universités, dernière instance nationale de gestion des enseignant·e·s-chercheur·e·s.

Enfin, si comme elle l’affirme dans son communiqué du 16 mars 2017, la CPU est aussi attachée qu’elle le dit « au principe d’évaluation, qui renvoie au principe des droits et obligations des fonctionnaires qui doivent rendre compte de leur activité », elle ne s’opposera pas à ce que les présidents d’université soient régulièrement évalués par les personnels de leurs établissements respectifs pendant leur mandat.

La CGT FERC Sup réaffirme son attachement au Conseil national des universités et à ses attributions en matière de qualification, de promotion et de gestion des carrières des enseignant·e·s-chercheur·e·s. C’est la dernière instances nationale qui protège les enseignant·e·s-chercheur·e·s des féodalités locales.

La CPU ne représente pas les universités qui ne sont pas nos employeurs. Elle n’est pas, comme le prétend son président, « la voix de toutes les universités ». Les personnels n’élisent pas les présidents d’université pour cela. La CGT FERC Sup dénonce de longue date cette dérive patronale de la CPU qui se manifeste une nouvelle fois.

La CGT FERC Sup s’oppose à la mise en œuvre du contrôle de carrière des enseignant·e·s-chercheur·e·s et appelle ces derniers à signer massivement la pétition mise en ligne pour soutenir la demande faite au ministère par les organisations CGT FERC Sup, SNESUP FSU, SNPREES-FO, SupAutonome-FO, SUD Éducation, QSF.

Signez et faites signer la pétition pour que le MESR n’ouvre pas l’application ALYA.
http://ne-pas-ouvrir-alya.ouvaton.org