"Pour un Service public national d'Enseignement supérieur et de Recherche laïque, démocratique et émancipateur"
Menu ☰Accueil > Les dossiers > La recherche > Restrictions liées aux ZRR : lettre au ministre de l’ESR
Objet : ZRR et libertés académiques
M. le Ministre,
Depuis 2012, les zones à régime restrictif (ZRR) se sont développées et continuent de le faire. Ce sont des laboratoires entiers qui passent en ZRR. Nous rappelons que le code pénal punit le fait de s’introduire sans autorisation ou de tenter de s’introduire dans une ZRR de 6 mois de prison et de 7500 d’amende € (cf. section de ce code nommée « atteintes à la sécurité des forces armées et aux zones protégées intéressant la défense nationale », notamment les articles 413-7 et 413-8). Début 2014, la CGT avait demandé « instamment que les laboratoires de l’ESR ne soient pas soumis au dispositif ZRR, à l’exclusion évidemment de ceux qui pourraient travailler directement pour la défense nationale ». D’autres syndicats de l’ESR avaient fait des demandes similaires. Nous restons opposés aux restrictions imposées par les ZRR sur les liberté de recherche et d’enseignement.
Sans revenir sur le fond, nous tenons à vous alerter sur une dérive grave provoquée par ces ZRR. Dans plusieurs laboratoires de l’Université de Lille, le règlement intérieur indique : « Le ou la DU sensibilise les agents sur la nécessité de ne pas diffuser d’informations sensibles. Pour les secteurs scientifiques protégés, toute communication, y compris les enseignements, qu’il s’agisse d’un colloque, d’un séminaire ou d’un congrès, est soumise à autorisation du HFDS sur saisine du de la FSD compétent(e). » (HFSD : haut fonctionnaire de défense et de sécurité, FSD : fonctionnaire de défense et de sécurité).
Les « secteurs scientifiques protégés » tels que définis par l’annexe 2 de l’Arrêté du 3 juillet 2012 regroupent à peu près tous les domaines scientifiques et techniques, en dehors des sciences humaines et sociales. Par exemple : « Biologie, médecine et santé : 11. Aspects moléculaires et cellulaires de la biologie. 12. Biomolécules, pharmacologie, thérapeutique. 13. Physiologie, biologie des organismes, populations, interactions. 14. Recherche clinique, innovation technologique, santé publique. »
Ce seraient donc toutes les communications, tous les enseignements, toutes les participations à des colloques, séminaires ou congrès qui seraient visés, et qui seraient soumis à autorisation du Haut fonctionnaire de défense et de sécurité (HFDS).
Ce règlement intérieur contrevient manifestement au principe d’indépendance des EC :
Il contrevient de façon générale aux missions d’enseignement et de recherche des personnels de l’ESR public (cf. article L. 123-3 du code de l’Éducation, article L. 112-1 du code de la Recherche et article L.141-6 du code de l’Éducation : « Le service public de l’enseignement supérieur est laïque et indépendant de toute emprise politique, économique, religieuse ou idéologique ; il tend à l’objectivité du savoir ; il respecte la diversité des opinions. Il doit garantir à l’enseignement et à la recherche leurs possibilités de libre développement scientifique, créateur et critique. »), qui ne sauraient être soumises –sauf exceptions très spécifiques– à une quelconque autorisation administrative.
Même la « Circulaire interministérielle n° 3415/SGDSN/AIST/PST du 7 novembre 2012 de mise en oeuvre du dispositif de la PPST de la Nation », discutable à bien des égards, précise page 30 : « Le règlement intérieur de la ZRR précise les règles encadrant les publications relatives aux travaux menés dans la ZRR. Ces règles doivent concilier le besoin légitime de publication des chercheurs et le respect des impératifs de sécurité. En cas de besoin, le chef de la ZRR peut demander un avis technique au haut fonctionnaire de défense et de sécurité, selon des modalités précisées dans les directives ministérielles. »
En aucun cas, il n’est prévu la mise en place d’un régime de demande d’autorisation systématique avant publication ou participation à un colloque scientifique. En conséquence, nous vous demandons de bien vouloir rappeler aux établissements d’ESR publics que les communications et les colloques scientifiques n’ont pas à être soumis à autorisation du FSD, que ce type d’abus ou d’excès de pouvoir est illégal, contrevient aux libertés fondamentales et aux libertés académiques et n’a en aucun cas sa place dans un règlement intérieur.
Dans l’attente de ces ajustements, nous inviterons nos collègues à respecter le code de l’éducation plutôt que d’obscurs et liberticides règlements intérieurs qui ne grandissent pas notre service public de l’enseignement supérieur et de la recherche.
Veuillez croire en notre attachement indéfectible au service public national d’Enseignement supérieur et de Recherche laïque, démocratique et émancipateur.
Signé : le SG de l’Union CGT FERC Sup
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